15h. Je farfouille encore chez le bouquiniste rue des Pierres Plantées. Ma montre me rappelle à l’ordre. Je paie et sors de la boutique. L air est frais. Je descends tranquillement les pentes en direction de mon abandon.
En fait, je suis déjà abandonnée. Cette ville est mon échappatoire. Mon sas de décompression. Je l ai détesté au début car ce n était pas là que je voulais être. Et j ai appris à l aimer. Et maintenant, elle me manque. Elle m appelle. Je remonte la voir régulièrement. Elle m a beaucoup appris sur moi.
Mes pas m amènent rue du Griffon. Je souris. Une fois j étais arrivée par là pour te surprendre, te repérer m attendant devant l Opéra. On revient toujours à ses premières fois….
Je traverse la place et continue ma flânerie rêveuse. A force de traîner je suis en retard. Mais je m en fiche. Ça te donnerait presque un prétexte légitime pour me punir.
Mon ventre me rappelle que j ai faim et qu il réclame sa brioche aux pralines roses. En retard pour en retard et punie pour punie, je m accordé un détour rue de Brest chez Pralus prendre ma douceur. Mes yeux pétillent quand la vendeuse me tend ce joli sac aux couleurs acidulées. A chaque visite, elle me rappelle qu ils peuvent livrer sur toute la France mais le fait que ce soit une brioche congelée qui arrive dans ma boîte aux lettres m ôte la magie de cette madeleine de Proust.
Et zut… la tu vas sérieusement râler. J accélère le pas en direction de l Institution ou je sais que tu m attends déjà exaspéré de mon énième retard.
Je te vois à travers la vitre. Assis, face à la banquette que tu m as réservé. Prévenant. Délicat. Tellement toi.
Des la première fois. Avant même de te rencontrer.
J ai aimé ta discrétion. Ton élégance. Ta pudeur. Ta simplicité. Ton calme. Ta douceur.
Et je t ai rencontré.
Et j ai continuer à aimer. Ta tendresse. Tes baisers. Tes caresses. Tes chatouilles. Être blottie dans tes bras. Te regarder faire mes tartines le matin. Ton regard. Le son de ta voix.
Et moi qui aime la fessée… a tes côtés j ai appris à la craindre. A la détester. A vouloir l éviter.
Parce que déjà tu préfères la pédagogie plutôt que de m avoir sur tes genoux. Parce que je sais que tu n aimes pas me punir.
Parce que tu as mal de me voir souffrir. Parce que tes mains qui me claquent sévèrement les fesses ne sont plus tes mains.
Parce que je ne supporte pas d être à 4 pattes quand le cuir de la ceinture vient me cingler
Parce que tu es le seul à oser me gifler et le seul de qui je l accepte. Et Dieu sait que je déteste ces moments où ta paume vient blesser ma joue et mon orgueil.
Parce qu avec toi je ne joue pas. Je suis naturelle.
Parce qu avec toi, dans tes yeux, je me sens belle.
Tu me prends telle que je suis. Avec mes contrastes.
Capricieuse. Fragile. Femme enfant. Intelligente. Businesswoman.
Je suis celle qui sort sans culotte et qui te laisse me penetrer avec de l huile de gingembre mais je suis aussi celle qui s endort le pouce dans la bouche sans se cacher et qui n aime pas dormir la porte fermée.
Je suis celle pour qui tu commandes une bouteille de Viognier mais celle pour qui au moment du dessert, tu commandes d autorité un café pour toi uniquement et une tarte au chocolat pour moi.
Tu ne juges rien. Tu es toi. Tu ne me demandes pas de changer. Tu es celui qui a compris ma façon de réagir. Qui a compris que me donner des ordres était vain. Que je les contournerai. Qui a compris que la force psychologique sur moi a plus d emprise que la fessée.
Tu me soumets mais ne me mets pas en infériorité.
Je mûris. J avais depuis longtemps appris qu un kleenex n était pas nécessaire pour enlever un rouge à levres quand deux corps sont en osmose. Mais ça n était pas une connaissance nécessaire à mon bien être.
J apprends maintenant que je peux compartimenter. Dissocier. Être plus légère.
Mais surtout j apprends que la douleur doit rester dans le cadre d un jeu. Que je pouvais être entourée de tendresse sans souffrir et donc arrêter de la rejeter comme je l ai fait maintes fois.
J apprends que la tendresse est apaisante. Et non plus dévastatrice.
Je t avais demandé lors de nos échanges écrits tardifs du soir de repousser mes limites. J étais intimement convaincue que tu devais me fesser jusqu a ce que j en pleure. Chose qui n est jamais arrivée. Je pensais que les pleurs m apaiseraient. Que j arriverais à ce fameux lâcher prise. Je te l’ai demandé comme une faveur. En sachant dans mons for intérieur que jamais tu ne me ferais mal au point d en pleurer. D ailleurs tu n aimes pas me faire mal.
Tu as choisi autre chose pour me faire lâcher prise.
Et si ce fameux lâcher prise c était tout simplement le bonheur? La légèreté ? Le bien être? L insouciance ? La douceur de vivre ? La tendresse? Et si finalement je me trompais sur moi ?
Tu m avais écrit : ” qu as tu appris jeune fille? Que c est de beaucoup de tendresse dont tu as besoin. Le reste n est que futilité et habillage ”
J aime les mots. J aime le langage. J’aime écrire. Je retranscris mieux mes émotions en les couchant sur une feuille qu en parlant.
Cette phrase m à mise à nue. Qu avons nous en commun toi et moi pour que tu comprennes mes besoins? Mes besoins que moi même je n avais pas cerné. Nous sommes des inconnus l un pour l autre malgré ces années qui passent . Nous évoluons dans un univers parallèle. Ce jardin intime fragile et secret à préserver dont j ai besoin . Et toi aussi je crois.
Tu tournes la tête et tu me vois arriver emmitouflée . Tu me souris. Il y a tellement de tendresse dans ce sourire. Je sais que tu ne me fesseras pas ou tellement peu. D ailleurs je ne te le demande même plus. Je n en n ai pas envie. J ai juste envie d être moi. De profiter de ces parenthèses. De ces jolies parallèles de la vie. De nous laisser porter. D être heureuse. Entourée de ta douceur.
C’est absolument magnifique @moonlightshadow. Bravo pour cette mise à nue de vos sentiments envers votre partenaire et cette analyse si sincère. J’en retire -parmi d’autres- une phrase à laquelle j’adhère totalement et qui doit nous guider : Tu me soumets mais ne me mets pas en infériorité.